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Maladie de Harada
Vogt en 1906, Harada en 1926 et Koyanagi en 1929 décrivirent cette maladie protéiforme.
La maladie de Harada ou syndrome de Vogt-Koaynagi-Harada est une uvéopapillite qui touche principalement les populations asiatiques et les ethnies mélanodermes. Cette pathologie est rare chez les caucasiens. Au Japon elle représente près de 8% des uvéites, sans prépondérance nette d'un sexe. Son caractère récidivant est un élément souvent rencontré.
On ne sait pas trop quelle est l'origine de cette maladie, mais on suspecte une maladie auto-immune qui se développerait sur un terrain génétique prédisposant. Il semble exister une réaction immunologique cellulaire, contre les mélanocytes. Des auto-anticorps ont été retrouvés dans la rétine, mais on ne sait pas s'ils sont la cause de la maladie, ou un simple phénomène associé à l'inflammation. Chez les japonais et les chinois, une prédominance HLA-DR4 et HLA-Dw53 a été notée chez ces patients assez jeunes.
Des cas familiaux sont parfois rencontrés, ce qui renforce l'idée d'une sensibilité génétique importante.
Les mélanocytes sont des cellules originaires de la crête neurale et vont former la peau, les méninges, la rétine, l'uvée, la cochlée et le labyrinthe. Toute maladie dirigée contre eux va donc altérer différents organes, la peau, l'oeil, l'oreille et le système nerveux.
1) La phase prodromique
Le patient décrit un épisode de maux de tête pendant quelques jours, avec parfois des signes neurologiques plus importants (signes méningés, vomissements) et une pleiocytose (lymphocytes + monocytes) du liquide céphalo-rachidien avec hyperprotéinorachie.
2) La phase uvéitique aiguë
Quelques jours après la première phase, le patient se plaint d'une baisse de vision brutale, généralement bilatérale, consécutive à une décollement séreux rétinien sévère bilatéral.
L'examen montre:
L'angiographie fluorescéinique met en évidence "un retard de perfusion inhomogène de la choroïde, une fluorescence tardive, des zones de décollement séreux et une fluorescence punctiforme en têtes d'épingles très caractéristiques" (Cohen et Quentel).
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Angiographie de la maladie de Harada
Pr André Mathis CHU Rangueil Toulouse France
3) La phase de convalescence
On assiste à une dépigmentation tégumentaire et uvéale, avec une alopécie, une poliose et un vitiligo. Le vitiligo périlimbique ou signe de Sugiura est souvent le premier signe de dépigmentation. Au niveau du fond d'oeil, on décrit une dépigmentation choroidienne avec un aspect en "coucher de soleil incandescent".
4) La phase de récurrence
On assiste à une chronicité des poussées, des épisodes d'uvéites antérieures et parfois une baisse de la vision, la rétine étant altérée par les soulèvements itératifs. On peut voir apparaître des néovaisseaux choroidiens, un glaucome ou une cataracte secondaire. L'angiographie montre généralement des effets fenêtre avec une hyperfluorescence hétérogène.
Il faut différencier cette maladie d'une choriorétinopathie séreuse centrale (CRSC), de métastases choroidiennes, de MEWDS, ou d'une ophtalmie sympathique.
Nous insisterons sur une maladie rare qui mime le VKH, le syndrome d'Alezzandrini. Cet ophtalmologiste argentin (Arturo Alberto Alezzandrini) décrivit des patients présentant d'un seul côté, une hypoacousie précédant la surdité, une rétinite pigmentaire, un vitiligo et une poliose. On ne recense que quelques cas dans le monde. Comme ils ont souvent un décollement de rétine, il est parfois difficile de confirmer la rétinopathie pigmentaire unilatérale.
Le Dr Hamel nous rappelle aussi une pathologie semblable, qui associe une hypothyroidie, une surdité, un vitiligo, une alopécie et une rétinite pigmentaire: Cowan et al. (1982). Retinitis pigmentosa associated with hearing loss, thyroid disease, vitiligo, and alopecia areata. Retina, 2, 84-88.
Il repose sur des flashs intraveineux de corticoïdes suivis d'une corticothérapie per os. La prescription d'immunosuppresseurs est rarement nécessaire.
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Même patient après 3 flash de corticoïdes
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