Le site des ophtalmologistes de France
Le SNOF remercie vivement l'Association Valentin Haüy pour son aide et son autorisation de reproduction de documents.
Valentin Haüy naquit le 13 novembre 1745 dans une famille de tisserands aisés de Saint Just-en-Chaussée, petit bourg du sud de la Picardie.
Son frère aîné, l'abbé René-Just Haüy, fut un savant, créateur de la cristallographie, membre de l'Académie des Sciences et de la Commission des Poids et Mesures, successeur de Dolomieux à la chaire de Minéralogie du Muséum d'Histoire Naturelle.
Valentin Haüy fit des études classiques à Paris, où il acquit la pratique du latin, du grec, de l'hébreu, et d'une dizaine de langues vivantes. Il gagna dès lors sa vie en traduisant des documents officiels, notariés, commerciaux ou privés. En 1786, il se prévalait du titre d'Interprète du Roi de l'Amirauté et de l'Hôtel de Ville. Il était depuis sa création par le roi, membre du Bureau des Écritures, où il exerçait ses talents de paléographe. Dans la mouvance du courant d'intérêt philosophique et humanitaire du XVIII' siècle pour les infirmes, Valentin Haüy s'intéressa d'abord aux sourds-muets, et à l'oeuvre de l'Abbé de l'Épée. Il se pencha sur le sort des aveugles à la suite d'un choc émotionnel.
En 1771, à la Foire Saint-Ovide place Louis-XV (place de la Concorde) à Paris, il assista à une représentation singulière qui l'indigna : une dizaine de pensionnaires aveugles de l'hospice des Quinze-Vingts, affublés de vêtements grotesques, et portant des lunettes opaques, exécutaient au moyen d'instruments divers "une musique discordante qui semblait exciter la joie des assistants". Dès ce moment, Valentin Haüy se jura de faire lire et écrire les aveugles pour leur rendre leur dignité. En mai 1784, sous le porche de l'église Saint-Germain-des-Prés, il rencontra un jeune mendiant, Francois Lesueur, à qui il fit l'aumône. Le jeune homme lui fit remarquer qu'il avait dû se tromper en lui donnant une pièce trop grosse : "Vous avez cru me donner un sous tapé, et c'est un écu que vous m'avez donné ! Valentin Haüy fut frappé de la finesse du toucher chez ce jeune homme. "L'aveugle... ne connaît-il pas les objets à la diversité de leurs formes ? Se méprend-il à la valeur d'une pièce de monnaie ? Pourquoi ne distinguerait-il pas un ut d'un soi, un a d'un f, si ces caractères étaient rendus palpables ?- Valentin Haüy entreprit dès lors l'instruction de Lesueur.
Sa grande idée étant de faire lire les aveugles, il fit réaliser des caractères spéciaux, car ceux des typographes, trop petits, ne convenaient pas. Ces caractères étaient des lettres romaines de forme ordinaire mais de taille très supérieure, il s'en servit pour gaufrer des feuilles de papier cartonné. Avec ce matériel, Lesueur apprit à lire, composa des phrases, acquit des rudiments d'orthographe, et en disposant des chiffres dans un casier de bois, apprit les quatre opérations de base du calcul. Il fit de rapides progrès, et Haüy annonca le succès de son entreprise dès septembre 1784, dans le Journal de Paris, recevant ensuite des encouragements de l'Académie des Sciences.
En 1783, une société philanthropique avait ouvert un atelier de filature pour une douzaine d'aveugles qu'elle avait pris en charge; elle confia l'instruction de ses protégés à Valentin Haüy. En 1786, L'institution des Enfants Aveugles était née. Son but était d'instruire les élèves et de leur apprendre un travail manuel : travaux de filature et d'impression typographique en relief et en noir étaient au programme. Consécration suprême, le 26 décembre 1786, se déroula à Versailles la présentation au Roi et à la Cour des vingt-quatre pensionnaires que comptait alors l'institution.
Sous la Révolution, l'institution fut prise en charge par l'Etat, le 28 septembre 1791. Valentin Haüy participa activement à la vie politique de son temps, et connut des heures difficiles sous le Consulat. On lui retira la direction effective de son établissement devenu Institut des Aveugles Travailleurs, et il dut démissionner en 1802.
Il créa alors le Musée des Aveugles, sorte d'école privée pour aveugles étrangers. Parmi ses élèves, il eut Alexandre Fournier qu'il emmena avec lui en Russie. A l'appel du Tsar Alexandre Ier il partit en effet pour Saint- Pétersbourg en septembre 1806, afin d'y fonder malgré bien des difficultés, une école qu'il devait diriger pendant onze ans.
Rentré à Paris, où on l'avait presque oublié, en 1817, il connut de nouvelles déceptions. Ce n'est que quelques mois avant sa mort, qu'il reçut du nouveau directeur, le docteur Pignier, l'autorisation de pénétrer dans la maison qu'il avait fondée, et qui portait à présent le nom d'institution royale des Jeunes Aveugles. Le 21 août 1821, une cérémonie solennelle fut organisée en son honneur.
Infirme, ne quittant plus le domicile qu'il partageait au Muséum avec son frère l'abbé René-Just Haüy, il s'éteignit le 19 mars 1822. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise.